Electricité : le dispositif anti-coupure démarre
RTE évalue à 10 euros par an et par foyer le coût du mécanisme de capacité. Les producteurs vont commencer à faire certifier leurs capacités dès le 1 er avril.
Initiée il y a cinq ans par la loi Nome réformant le marché de l’électricité, la création d’un « mécanisme de capacité », destiné à améliorer la sécurité d’approvisionnement, va connaître sa première mise en œuvre. A partir du 1er avril, tous les producteurs d’électricité en France, du nucléaire à l’éolien en passant par les centrales à gaz ou l'effacement de consommation, vont devoir faire certifier leurs capacités de production. Ils se verront attribuer des « certificats » qu’ils pourront monnayer, de gré à gré ou sur un marché, avec des fournisseurs d'électricité. Ces derniers devront en effet démontrer leur capacité à servir leurs clients même en cas d’hiver très froid. « C’est un mécanisme destiné à avoir l’assurance de passer les pointes de consommation », a expliqué ce mardi Thomas Veyrenc, directeur du département Marchés de RTE. Le gestionnaire du réseau de transport d’électricité vise une première application de ce mécanisme « anti-coupure » au 1er janvier 2017.
En créant un marché où l’offre et la demande devront s’équilibrer, une rémunération supplémentaire pourrait être dégagée pour des actifs pour lesquels la seule vente d’énergie ne garantit pas la rentabilité. « Des installations pourront être rémunérées non pour l’énergie qu’elles produisent effectivement mais pour l’énergie qu’elles sont susceptibles de produire », explique Thomas Veyrenc. Selon une simulation, RTE table sur un coût moyen du nouveau dispositif de 75 à 80 centimes d’euro par mois sur la facture d’un particulier, soit environ 10 euros par an. Compte tenu des fermetures programmées de centrales, pour des raisons économiques ou environnementales, RTE a jugé qu’il pourrait manquer 2 gigawatts de capacité lors de l’hiver 2016-2017. En raison de son important parc de chauffage électrique, la consommation française est de fait particulièrement thermo-sensible (voir graphe).
Critiques
Pour RTE, le dispositif va « révéler les stratégies des acteurs. Pour l’instant, les producteurs ont intérêt à dire qu’ils vont fermer des centrales pour inciter les pouvoirs publics à réagir ». Les propriétaires de centrales à gaz devront ainsi trancher en fonction du prix de la capacité. Tout comme EDF, qui devra se prononcer sur l’avenir de son parc au fioul. Certains restent toutefois très critiques, comme Direct Energie : « le marché sera très volatil et le dispositif ne va donc pas envoyer de signaux d’investissement. Il aura le même défaut que le marché du CO2 », estime Fabien Choné.
La France doit encore notifier son dispositif à la Commission européenne, qui s’inquiète du développement de dispositifs hétérogènes en Europe (réserves stratégiques, appels d’offres, enchères inversées...). La ministre de l’Energie Ségolène Royal explore par ailleurs les moyens de prendre en compte les centrales des pays limitrophes, qui participent à la sécurité d’approvisionnement française. Une demande portée par GDF Suez ou EON. Et elle a mandaté le député François Brottes pour une éventuelle révision du nombre d’heures de coupure aujourd’hui jugé acceptable. S’il était abaissé, le prix de la capacité grimperait.